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LA VOIX DES OMBRES
18 mars 2009

YSENGRIN - T.R.I.A.D.E

YSENGRIN_cover


T.R.I.A.D.E est un disque qui ne pourra pas plaire à toutes les oreilles.

Et c'est un album qui va nécessiter de s auditeurs : d'une part de la culture, musicale comme littéraire; d'autre part de l'ouverture d'esprit. De la persévérance et le moins d'a-priori possibles. Et enfin, quelque chose qui vous fait planer : moi je viens de sortir un bon whisky de dix-huit ans d'âge pour ce faire... T.R.I.A.D.E est un ENORME disque, mais un disque ésotérique : comme Guido son géniteur le dit lui-même, YSENGRIN, c'est de l' « Hermetic Dark Metal ». Une grosse soupe bien personnelle, du metal extrême exigeant, en somme : élitiste. Mais qui vaut son pesant de cahouètes, je vous le dis... Un album donc, produit par Heidenwut Productions, qui va nécessiter du recul comme de se laisser happer par cet univers macabre, moyenâgeux et surtout occulte, un disque que vous devrez lire et écouter, un opus dense et vaste à la fois qui exigera de vous de nombreuses écoutes...

En cette heure où la rumeur du Chaos, de la Misère et de la Mort se fait de plus en plus forte, nos nations,  Guido a.k.a YSENGRIN revient au passé pour éclairer son présent et nous donne à réfléchir et à écouter avec un disque faisant appel à l'occulte et à l'hermétisme du Moyen-Âge, une période de l'humanité qui paraît bien lointaine alors qu'aujourd'hui, la nanotechnologie envahit tous les domaines de nos vies éphémères... Les textes et les gravures d'époque peuplent et illustrent ainsi fort bien dans le livret douze pages l'univers musical d'YSENGRIN... Il faudra vous y référer, d'autant que Guido déclame et grogne de manière à ce que les textes soient compréhensibles [et ça c'est une bonne chose : je veux bien que les grogneurs grognent sans que l'on y comprenne quelque chose : mais faudrait dans ce cas que les paroles soient donnés dans le livret dans ce cas – sinon à quoi bon les grogner si personne ne pige ?]... Voilà donc une première triade qu'il ne faudra pas négliger : YSENGRIN est un tout, musique-textes-images. T.R.I.A.D.E c'est également un album-concept fait de neuf pistes regroupées en trois parties : Putréfaction, Élévation et Illumination. Un cheminement, une quête vers la Transcendance... Guido est assurément quelqu'un d'érudit et de spirituel ! Et tout le livret est truffé de références. 

Pour ce qui est de la musique, Guido ne facilite pas non plus la tâche du chroniqueur que je suis... Sa définition est néanmoins imaginative et donne une idée de ce qu'est YSENGRIN, ce loup espiègle du conte populaire... De toutes mes forces, je rattacherais bien YSENGRIN au Black Metal, rien que pour l'univers occulte de T.R.I.A.D.E ainsi que pour une partie de ses riffs, et ses plages discrètes de clavier, ainsi que sa voix parfois et également, pour l'intrusion de la guitare acoustique de temps à autre... Mais le Death-Doom des années 80 et première moitié des 90 forme un socle inaliénable de la personnalité d'YSENGRIN, avec une pincée de Heavy Metal par-ci par-là. YSENGRIN, c'est un peu ce genre de chose qui avance à son rythme, mais que rien n'arrêtera... Une procession toute macabre, qui fait parfois froid dans le dos – La Camarde, le premier titre, évoque cela très bien... Voilà donc comme vous le constatez, un disque difficilement appréhendable : s'il semble éclectique, il est toutefois largement habité et personnalisé par son géniteur...

Et je ne vous ai pas tout dit, car Guido s'amuse encore à brouiller les pistes – ce lupus est sacrément rusé et espiègle, je vous le dis – en faisant joujou avec les effets et les sons. Ainsi la guitare électrique qui « tchouchoute » comme une locomotive obsédée et donne le tempo général possède un son terriblement métallique, me faisant penser bizarrement à ce que ferait une guitare... avec des cordes en fer blanc ! J'image, mais ce son, je l'ai très rarement entendu, alors pour le décrire, vous repasserez. Il y a également des notes plus cuivrées qui parsèment l'opus. Quant à la basse, si elle est sous-jacente, on ne l'entend pas assez à mon goût et n'a qu'un but utilitaire. La (vraie) batterie elle, sonne très organique pour ce qui est des peaux, et très claquante pour ce qui est des cymbales : elle sonne très « live », caverneuse presque et elle pourra gêner si l'on ne s'habitue pas (en multipliant les écoutes donc). Moi j'adore. Les voix sont elles variées, et contrastent en étant largement inspirées par le type Death Metal. Elles collent fort bien à l'univers d'YSENGRIN. Quant à la tonalité médiévales, elle n'est qu'évoquée avec plus ou moins de force par les claviers BURZUMiens, par les guitares nécrotiques et les passages acoustiques (qui me font penser au premier de SATYRICON)... Mais elle est palpable, pour sûr !

Pour ce qui est des structures, je dirais qu'elles sont assez classiques et que T.R.I.A.D.E en son entier forme une masse bien tassée, bien compacte de trois-quarts d'heure... Les aérations existent (les trois acoustiques fermant les trois parties), mais ne cloisonnent pas véritablement l'opus, qui pourra ainsi se montrer indigeste pour certains auditeurs. Je ne vous parlerais pas du très bel artwork monté par Guido pour cette T.R.I.A.D.E ésotérique que je vous laisse découvrir, mais de la production, qui est vaste, très ample et typique des productions extrêmes du Death de la fin des 80. Puissante, précise et ronde – l'album me fait penser au mythique Diabolic Serenades de ANCIENT RITES ou encore à 50 contre 1 de SA MEUTE ou à La Sanie des Siècles de PESTE NOIRE... Et je ne serais pas étonné si un jour Guido – qui a fait appel à Tore Stjerna du célèbre Necromorbus Studio pour le mastering – me dit qu'en fait, ce full-length a été enregistré dans la grande salle commune d'un château médiéval, la nuit, alors que la salle est illuminée de centaines de bougies...

Ce qui me plait dans ce disque, outre sa personnalité indéniable, consiste en son atmosphère mariant à la fois le passé et ses mystères et son aspect... novateur dirais-je, son ancre posée dans le présent. Je crois qu'YSENGRIN bâtit là avec sa T.R.I.A.D.E un long format que « l'histoire française » du metal extrême ne va pas pouvoir mettre de côté, même si l'homme est modeste, ce Zénon de Yourcenar de 2009... De l'occulte, de l'hermétisme d'alchimiste, une espèce de réveil, ou de vieille tradition de nos jours remisée au placard mais que quelques initiés aiment à faire resurgir de temps en temps... Voilà dans quoi me plonge YSENGRIN. Sur ces mots, je lève mon verre de bon malt à Guido et lui souhaite de persévérer dans sa Voie, qui n'est pas la mienne, mais qui est d'une grande finesse et d'une intelligence inespérée. Bravo à lui. Quant à vous chers lecteurs, il ne vous reste plus qu'à oser plonger dans cette T.R.I.A.D.E de Mestre YSENGRIN... Ave !

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